À la fin du IIe siècle av. J.-C. déjà, une puissance agricole

À la fin du IIe siècle av. J.-C. déjà, une puissance agricole

Avant même l’arrivée des Romains à la fin du IIe siècle avant notre ère, le Vaucluse est un territoire déjà prospère. « Il avait connu un fort développement économique et démographique au cours des siècles antérieurs grâce à ses liens avec Marseille, fondée par les colons grecs de Phocée. Les conditions géographiques et climatiques étaient très favorables à l’agriculture, il était agréable de s’y installer et facile d’y circuler »,expose Jean-Marc Mignon, l’un des archéologues du Département, spécialiste de la période. On y compte pas moins de six chefs-lieux de cités sur lesquels s’appuieront les Romains pour administrer, avec les élites gauloises en place, ce territoire stratégique au cœur de la Narbonnaise, vaste province romaine qui s’étend d’ouest en est des Pyrénées jusqu’aux Alpes et du sud au nord du littoral méditerranéen jusqu’au lac Léman et aux portes de Lyon. L’actuel Vaucluse est déjà un carrefour important, à la croisée de la Via Domitia, qui parcourt tout l’arc méditerranéen d’est en ouest en passant par Apt et Cavaillon, et de la Via Agrippa qui fera de la vallée du Rhône un axe majeur de l’Empire en reliant Lyon, la nouvelle capitale des Gaules, à Arles et à la Méditerranée via Orange et Avignon. À l’écart de ces deux routes principales, Carpentorate (Carpentras) tire quant à elle sa richesse de ses coteaux féconds à l’abri du Mont Ventoux. Privée des édifices monumentaux qui font la gloire de ses voisines - à l’exception d’un arc commémoratif toujours visible près de la cathédrale - cette dernière était avant tout une ville de marché avec une vaste place publique centrale où s’échangeaient les productions abondantes des environs.

La rue commerçante de Vasio longeait de luxueuses domus, de plusieurs milliers de mètres carrés comme la Maison du Dauphin découverte près du théâtre antique. - © Ville de Vaison la Romaine - Aristeas

Dès qu’ils prennent pied dans la région, les Romains s’attellent à structurer le territoire dans toutes ses dimensions. Fidèles à leur réputation de bâtisseurs pragmatiques, autant soucieux d’asseoir leur domination que de faire fructifier leur nouvelle possession, ils créent un maillage de voies secondaires, des ponts, des aqueducs, construisent des villes dotées de toutes les commodités au contact des anciennes agglomérations gauloises, n’hésitant pas à détourner des cours d’eau ou à sculpter les collines. Surtout, ils s’attellent à organiser un réseau de grandes exploitations agricoles.

Au début des années 2000, l’une d’elles a été mise au jour à Caumont, près de la Durance et de la voie Domitienne. D’autres encore ont été découvertes comme la villa des Bruns à Bédoin, la villa de Tourville à Saignon avec sa maison de maître, ses pressoirs à vin et son chai, ou encore la villa des Borrys à Mérindol où ont été trouvés un four de potier et diverses installations. L’objectif est de bâtir une véritable puissance agricole, qui permette entre autres de supporter l’effort des armées conduites par Jules César durant la Guerre des Gaules(58 à 51 avant notre ère), puis d’exporter les surplus dans tout l’Empire. Leurs efforts se concentrent en particulier sur le vin, dont la consommation s’est beaucoup développée dans la vie quotidienne en Gaule et dont la production est ancrée de longue date dans le Vaucluse. En dehors de la côte méditerranéenne, des traces de viticulture, parmi les plus anciennes connues en France, ont été découvertes à Sorgues, sur le site du Mourre de Sève, où les premières cuvées remonteraient au Ve siècle avant J.-C., bien avant la conquête romaine. Poussés par la technicité romaine, les rendements explosent et le vin de la Narbonnaise se boit jusque dans les provinces éloignées d’Egypte ou de Grande-Bretagne.

Visuel haut de page : Au sud de Vasio (Vaison-la-Romaine), une rue très commerçante menait au forum, où l’on pouvait faire ses achats à l’abri du soleil.

Visuel haut de page : © Ville de Vaison la Romaine - Aristeas