Société

Florent Oddon : un champion dans les nuages

De la construction d’un petit avion dans son garage à Vaison-la-Romaine au titre suprême de champion du monde de voltige aérienne, Florent Oddon n’a pas perdu de temps pour atteindre le plus haut niveau international.

Publié le

Aussi loin qu’il se souvienne, le capitaine Florent Oddon a toujours voulu piloter des avions et évoluer librement dans les airs. Un rêve de gosse, qu’il a concrétisé en intégrant l’une des meilleures formations au monde : l’équipe de voltige de l’armée de l’Air et de l’Espace (EVAAE). Faisant partie d’une véritable élite et monte, chaque jour, à bord de son Extra 330 pour parfaire ses qualités de pilote. Une maîtrise du pilotage obtenue à force de travail et de patience, et qui le place parmi les meilleurs, comme en témoigne son palmarès : champion de France « excellence » en 2018, champion de France « freestyle » en 2019, premier à l’Open de France en 2021, mais aussi champion de France « Elite » et double champion du monde en équipe et en individuel en 2022…

 

 

Les figures aériennes sont exécutées un cube de 1 000 mètres de côté.

 

Il fabrique son propre avion !

« Le virus m’a pris très tôt, se souvient-il. « Mon père est pilote en aéroclub, et il m'emmenait déjà avec lui dans le ciel lorsque j’étais tout petit. Puis, c’est en 2004, lors d’un baptême de voltige, que j’ai su que c’était ce que je voulais faire ». Se demandant alors comment financer ses vols, le futur pilote décide tout simplement de fabriquer son propre avion… dans son garage à Vaison-la-Romaine, sa ville natale, à laquelle il reste très attaché. Un projet aussi insolite que fou.

Il se procure les plans du plus petit bimoteur au monde (un mètre de haut et cinq d’envergure) et se lance dans l’achat des matières premières pour concevoir l’appareil. S’appuyant sur un manuel, il façonne, pendant sept ans, les gabarits, un à un, avant de pouvoir réaliser les pièces finales.  « Une fois terminé, cet avion me permettait de faire de la voltige élémentaire. Des petits tonneaux, des petites boucles… Avec 15 litres de sans plomb, je pouvais faire une heure de vol ». En parallèle, il continue à prendre des leçons de voltige en aéro-club, avec toujours le même objectif en tête : en faire son métier. 

Patience, patience…

Il a beau posséder toutes les qualités et compétences requises pour être pilote de chasse lorsqu’il intègre l’armée de l’Air en 2009, les places sont peu nombreuses. Il devient alors pilote de transport, effectuant des missions de fret, de largage de parachutistes, mais aussi d’évacuation sanitaire, notamment au Mali et au Tchad, à bord de son Casa 235.

« J’ai toujours orienté ma carrière de manière à me laisser, peut-être, la possibilité de venir ici, à la base aérienne de Salon-de-Provence », souligne-t-il. Et c’est vrai, car même s’il a la possibilité de rejoindre pendant trois ans des destinations telles que Cayenne, la Réunion ou encore Tahiti, il décide de ne pas partir afin de pouvoir répondre présent si une place au sein de l’EVAAE se libère. C’est en 2017 que l’opportunité d’une sélection se présente enfin, et qui permet à Florent d’être retenu au sein de la formation.  

 

 

Les meilleurs des meilleurs

Faire rayonner l’armée de l’Air et de l’Espace en participant à des meetings aériens et des compétitions en France et à l’étranger et susciter chez les plus jeunes des vocations et des passions, voilà la mission de Florent Oddon au sein de l’EVAAE. Lui et ses trois coéquipiers, qu’ils soient issus des spécialités chasse, instruction ou de transport, font partie, avec la Patrouille de France, des équipes de présentation de l’armée de l’Air. Une tâche qui implique un investissement quotidien, aussi bien physique que mental. 

« Je ne suis pas très grand, ce qui est un avantage pour supporter les G, souligne le double champion du monde. Je préfère donc voler au maximum et dépenser mon énergie en vol plutôt que d’aller à la salle de sport ». Et sur le plan psychologique, le travail est là aussi considérable. Afin de lutter contre le stress, la préparation mentale est indispensable, et aide à réaliser au mieux le programme de vol lors d’une compétition. « Sur cet aspect, nous avons développé des protocoles particuliers avec notre hypnothérapeute Jean-Charles Arliaud qui nous aident à optimiser la préparation de nos vols et mieux lutter contre le stress ». 

 

Les figures, techniquement très complexes, doivent être parfaitement exécutées dans un volume d’évolution très restreint, appelé « box », correspondant à un cube de 1 000 mètres de côté. Pour y parvenir, c’est d’abord au sol, debout sur ses jambes, que le pilote s’entraîne, avant d’enchaîner les figures un fois en l’air. « Cela s’appelle la mentalisation du vol, précise Florent. Il s’agit de répéter le vol dans un box fictif qu’on a dessiné au sol. Ce travail est indispensable si on veut réussir à faire tenir l’avion dans l’espace limité, en fonction de toutes les contraintes météo du jour  ». Florent Oddon, qui vient d’être sacré triple champion d’Europe en septembre dernier, en Italie, continue de vivre son rêve, gardant les pieds sur terre et la tête dans les nuages. 

Le capitaine Florent Oddon vient d’être sacré triple champion d’Europe en septembre dernier, en Italie.