Archéologie – Statue découverte à Vaison-la-Romaine en 2021

Restaurée, la déesse gallo-romaine intègre la réserve archéologique

Une statue datant du Ier siècle a été découverte en février 2021 à l’occasion d’un diagnostic d’archéologie préventive réalisé par le Service d’Archéologie du Conseil départemental de Vaucluse à Vaison-la-Romaine, chemin de Mirabel, dans un secteur situé au Nord-Est du théâtre antique.

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Une découverte issue d’un ancien sanctuaire

La statue reposait sous des couches de rejets d’offrandes cultuelles contenant des objets variés et bien conservés : il s’agit sans doute de la « décharge » d’un sanctuaire ou d’un « rite d’abandon » du culte d’une divinité.

L’ensemble du mobilier et des objets retrouvés comprend notamment un autel miniature appartenant à une sculpture, quatre autels votifs, de la céramique miniature, des éléments métalliques, de la faune et des restes végétaux, ainsi que des fragments de dalles de sol, d’un chapiteau de pilastre, d’enduits peints, de blocs de grands appareils, de dalles de toiture, de tuiles et des moellons de petits appareils.

Un personnage féminin richement vêtu, mesurant 137 cm de haut et pesant 223 kg

La statue représente un personnage féminin drapé dont les bras, la tête et les pieds sont manquants, tandis que la poitrine est bûchée (arrachement volontaire).

De grandeur nature (137 cm pour la partie conservée et 64 cm de largeur, pesant 223 kg) elle est en calcaire coquillier.

Elle est debout, de face, en appui sur la jambe gauche/ La jambe droite est légèrement pliée, écartée sur le côté. Son bras droit pend le long du corps, tandis que le bras gauche, qui est manquant, devait être levé, comme l’indique assurément la position de l’épaule gauche.

La statue est vêtue d’une tunique-chiton plissée et boutonnée par cinq boutons sur les manches (calasis). Par-dessus, une stola (vêtement traditionnel des femmes mariées de la Rome antique) avec bretelle forme des plis en V emboîtés à l’encolure, moule la poitrine.

Elle est retenue par un cordon à noeud à la taille, dessine une série de plis anguleux et désordonnés sous la poitrine. Un lourd manteau (pallahimation) chevauche l’épaule gauche, traverse le dos en oblique et remonte de la hanche droite sur l’avant-bras gauche pour former une cascade de plis le long du dos, de la jambe et du côté gauche.

La disposition du manteau sur les épaules et la présence de courtes mèches ondulées sur l’arrière du cou indiquent que la femme avait la tête découverte (capite aperto).

Le modèle du drapé à tunique ceinturée est souvent utilisé pour les statues féminines, idéales et iconiques, à partir de la deuxième moitié du Ier siècle et au cours du IIe siècle de notre ère.

Une déesse féminine populaire en Gaule au Ier siècle

L’originalité de la statue réside dans la position surélevée de son bras gauche qui laisse penser au port d’un attribut dans la main gauche, commune dans la représentation des divinités féminines.

Les indices capillaires (le rendu mouvementé des mèches et leur disposition sur les trapèzes suggérant que les cheveux étaient détachés) vont également dans ce sens, les matrones et princesses romaines étant généralement représentées les cheveux attachés.

Cette statue présente donc de nombreuses similitudes avec l’iconographie de certaines divinités féminines matronales, telles que Vénus, Cérès, ou bien Junon, déesse matronale par excellence puisque épouse de Jupiter. Elle est à l’origine d’une dynastie divine.

Cette déesse, particulièrement populaire en Gaule, est souvent représentée avec un chiton noué à la taille, le bras gauche levé et tenant un sceptre.

La présence de la stola, constitue un repère chronologique très précis si l’on considère que cet attribut n’est plus représenté après l’époque julio-claudienne (entre -27 et 68 après J-C).

Une restauration confiée à l’atelier de Jean-Louis Bouvier

A l’issue du diagnostic réalisé par le Service d’Archéologie du Département, la statue a été confiée à l’atelier de restauration Jean-Loup Bouvier, situé aux Angles (Gard), afin de procéder à un nettoyage et à une consolidation permettant son étude.

Le travail de l’atelier de restauration, qui s’est déroulé de fin mars à fin novembre 2021, a consisté au nettoyage à l’eau déminéralisée et à la spatule en bois de la couche de sédiment sableux, très compacte, dont était recouverte la statue.

L’étude de la statue a été réalisée par Aurora Taiuti (Docteure en Archéologie, Sorbonne Université).

Conservée au dépôt archéologique d’Avignon, cette statue devrait, à terme, intégrer les collections du Musée de Vaison-la-Romaine.